Message du Professeur Zolmirel (suite et fin)
Linbel, le père d’Amoni, était un alien des plus agréables. Il avait le don de savoir tout de suite mettre à l’aise autrui. Étant plutôt timide, je le trouvais très cultivé et brillant, autant que pouvait l’être mon ami.
- Votre fils est un très noble alien, lui exposais-je. Il agit pour soigner de nombreux blessés parmi les hors mondes.
- Tout à fait, répondit son père. C’est là un sort bien cruel qui est réservé à ces enfants. Ici, nous sommes opposés à toute forme de servage. Nos enfants travaillent, mais nous veillons à ce que cela soit adapté à leur âge et qu’ils en soient fiers. Je travaille en un centre d’adoption et de soins de l’esprit. En ce lieu, de nombreux servants sont soignés, puis confiés à des familles. Il faut veiller à reconstruire toute leur trame émotionnelle. Beaucoup ont vécu des choses très douloureuses. Le reste de l’année, j’aide mes parents pour récolter les céréales, les légumes et les plumes et l’engrais des oiseaux. Il existe plusieurs colonies d’oiseaux qui font étape ici. Nous les accueillons et les nourrissons, puis, en échange, ils nous laissent des plumes et du guano.
- Tu as bien agi, fit Ornila, son épouse. Ils ont chargé tout un vaisseau de Nostra, pour aider ces malheureux.
Chacun de nous sourit d’un air attristé. La planète Nostra était un monde ami. Ses habitants vivaient un véritable désastre. L’une des étoiles était entrée en éruption, transformant en quelques jours plusieurs provinces en geysers de lave.
Fort heureusement, cela avait été anticipé de longs mois auparavant. Les vaisseaux des êtres de lumière avaient emmené tous les habitants en quelques semaines. Chacun avait pu sauver ses effets personnels, ses travaux, son vaisseau avant la catastrophe.
De nombreux vaisseaux environnementaux avaient préservé la faune et la flore, avec les formes de vie biominérales.
Les habitants de Nostra, surtout des aliens de nuit, avaient pu trouver refuge sur un astéroïde. Très industrieux, ils y avaient édifié de grandes cavernes confortables. Hélas, ces malheureux étaient désemparés par la perte de leur monde natal. La gravité de l’astéroïde était différente, les enfants peinaient à s’y habituer. Un grand nombre de soigneurs avait été envoyé sur place. Cette histoire tragique avait suscité un formidable élan de générosité.
- Les pauvres, ils n’ont plus rien, soupira Amoni. Il faut absolument les aider à édifier au plus vite des serres, pour qu’ils puissent tenir.
- Tous les agriculteurs de la région envoient des denrées, exposa Linbel. Ils reçoivent aussi des remèdes, des habits, des couvertures. Des experts en forage et en édification de cités ont pu construire les premières habitations.
- Les blessés les plus graves ont été envoyés au centre de soins, expliqua Amoni. Certains jeunes ont du mal à respirer. Sitôt qu’ils arrivent sur notre monde, la gravité plus forte permet de les stabiliser. Ils ont un tel courage ! Pas un seul de ces enfants ne se plaint. Nerti et Zilner sont très heureux d’apporter leur aide.
Chacun de nous sourit. La meilleure amie de Nerti et Zilner était une petite alien de nuit. Il était donc tout naturel qu’ils viennent en aide à ces enfants.
Ornila se tourna vers Minel d’un œil affectueux.
- Je suis si heureuse que vous soyez parmi nous, assura-t-elle. J’espère que vous vous sentez bien.
- Je me sentir très bien. Vous très honorable accueil et heureuse maison pleine de bonheur, assura Minel avec allégresse.
- Cela me fait très plaisir que notre fils ait enfin trouvé une moitié ! Amoni a toujours vécu en compagnie des livres. Il paraît qu’autrefois vous étiez ingénieure stellaire spécialisée en réacteurs ?
- Oui, assura Minel. Je devais agir pour améliorer vaisseaux, propulsion, en continu. Voyages toujours chronométrés, et chercher toujours meilleure performance, meilleur rendement énergétique. Zilmis répare des vaisseaux aussi, très habile pour prendre soin astronefs anciens musées.
- Voilà qui doit être passionnant ! s’extasia une Ornila des plus enjouées. Vous venez de la province des montagnes ? s’enquit-elle en se tournant vers Zilmis.
- Oui, mon peuple est voisin du vôtre. Cela fait longtemps que je suis parti, mes parents étaient opposés à notre union, expliqua-t-il. Je suis androgyne, fit-il d’un air intimidé, et en notre province des montagnes, les femelles et les androgynes sont considérés comme des esclaves.
- Cela est bien dommage, répondit Ornila. Ici vous pouvez être rassuré, les androgynes sont aimés et appréciés. Nous sommes très tristes de voir la peine qui jaillit de cette province et espérons qu’avec le temps les esprits s’ouvriront.
- Mon oncle et ma tante m’ont beaucoup soutenus, assura Zilmis. Ils sont les seuls membres de ma famille avec lesquels je puis avoir de belles relations.
- Votre famille a dû réprouver votre intérêt pour la mécanique stellaire, cela a dû être très difficile pour vous. Vous avez fait preuve de courage en persistant dans cette activité qui vous plaisait, fit remarquer Selani, la grand-mère d’Amoni. Et vous avez bien fait ! dit-elle allègrement.
Amoni et tout le monde eut un long rire.
- Il n’est personne qui pourra l’empêcher de piloter un transbordeur suborbital géant, lança Estarel, son époux, d’un air complice.
- Il le faut bien, répondit Selani. Et tous ces enfants qui attendent dans ces cavernes en grelottant. Pauvres petits chéris ! Il leur faut des denrées alimentaires, des céréales et des habits. C’est parce que les Kolals femelles peuvent travailler dans le domaine stellaire que notre flotte peut ravitailler les colonies les plus éloignées. Nous pouvons construire et expédier des vaisseaux mondes au plus vite. Cela leur permettra de vivre confortablement tout en édifiant des serres.
Je souris d’un air admiratif. Selani me fit aussitôt penser à Erazel, notre vénérable ancienne, toujours prompte à aider autrui. C’était la vérité, les images insoutenables de petits aliens de nuit entassés les uns près des autres parmi la pierraille pour y dormir étaient insoutenables. Tout cela avait révolté les miens.
Des abris de fortune avaient été édifiés par les adultes et les secours, pour abriter les enfants et les blessés. Les choses avaient bien progressé depuis, grâce à un afflux de volontaires. Il restait cependant beaucoup à faire pour installer le chauffage partout en ces lieux, et que chacun puisse retrouver une vie paisible.
Les larmes aux yeux, je murmurais des prières. Zilmis m’imita.
Le repas délectable se poursuivit, tout le monde faisant honneur aux plats. Il s’acheva par un gâteau succulent de belle taille, agrémenté de fruits, de crème et de mousseline florale. Ornila servit chacun d’un air radieux.
Nous nous sommes régalés. Tout ceci constituait le sommet de la cuisine Kolal. Le gâteau était un enchantement de saveurs.
Pendant la durée de notre agréable repas, la nuit était tombée. L’heure du soir vint, et avec elle, le bonheur d’écouter de bonnes histoires contées par Selani et Estarel. Comme ils étaient très âgés, ils avaient vécu en ces temps fort reculés, presque héroïques pour nous. Ils connaissaient les histoires contées par les premiers Kolals à venir peupler notre monde, voici plusieurs millénaires.
- En ces temps anciens, il n’était rien d’autre que la nature en ces montagnes, exposa-t-il. Les premiers navigateurs furent très heureux lorsqu’ils découvrirent cette planète, au point exact annoncé par les prêtres et les prescients. Elle était de gravité et de radiance favorable pour les nôtres. Les Galmols ont détecté notre approche, et ils nous ont non seulement autorisés à atterrir, mais aussi, à nous installer. Ils nous ont fait le meilleur accueil. Nous pouvions rester à condition que notre population soit en nombre invariant. Nous devions respecter et protéger les écosystèmes, prendre soin des animaux et partager notre science. Pour ce qui est de la religion et du partage des ressources entre nous, nous pouvions agir comme bon nous semblait, pour peu que tout le monde soit respecté et heureux. Nous avions le droit d’édifier des temples, de faire des pèlerinages, d’installer des centres de guérison, des instituts d’algèbre, de science aérospatiale, de gastronomie. Une nouvelle vie s’offrait à nos ancêtres. Alors, ils ont peuplé ce vallon, fertilisant les sols, drainant et amendant les zones incultes. Une partie de la vallée a été transformée en roselière. Depuis, d’importantes populations d’oiseaux et de lézards volants fréquentent ces lieux. Il existe dans la vallée voisine des fermes qui accueillent chaque année des troupeaux d’herbivores laineux. Leur laine tombe naturellement en une toison souvent presque entière. Elle est recueillie pour faire une infinité de choses, des tapis, des couvertures, des manteaux et des matelas. Les animaux broutent les pâturages et cela fertilise les sols. Il existe ensuite un grand nombre de champignons qui poussent grâce à cela. Nous sommes contents que le partage des ressources ait été étendu à toute la planète au fil des siècles. Nous sommes très heureux de vivre ici, la nature est abondante. Chacun possède une jolie ferme, un ouvrage plaisant. Notre vie est très insouciante.
Nous nous sommes salués, la nuit était tombée, et il était l’heure d’aller dormir. J’étais comblé de ces échanges si agréables. La famille d’Amoni était très bienveillante. Je sentais des aliens posés, d’une grande intelligence.
Zilmis et moi-même sommes entrés en notre chambre. Je fermais la fenêtre et contemplais au loin un dernier vaisseau agricole qui déversait sa cargaison dans une grande cuve. Il s’agissait d’un transporteur d’engrais. La cuve se referma. Non loin de là, une méthanerie révélait de hauts cylindres brillants. La production de méthane générée par les engrais était très importante et bénéfique sur mon monde.
La plupart des vaisseaux possédaient des réacteurs d’appoint au méthane, car cela générait une combustion parfaite. Il en était de même pour tout type de four, les usines de métallurgie.
Tout était réutilisé. Je fermais la fenêtre, m’allongeais et souris en songeant aux héroïques croiseurs Kolals venant se poser en cette belle région.
J’entrais en un rêve paisible. Une belle flotte de navires Kolals apparut dans le ciel. L’un des pilotes me rappelait curieusement Amoni.
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Texte partagé par les Les Nouvelles Chroniques d'Arcturius - Au service de la Nouvelle Terre