Comment les pratiques spirituelles m’aident à surmonter mon chagrin climatique

Ce post de Thérèse DesCamp m’a fait pleurer. . . « Tôt par une journée enfumée du mois d’août, j’ai finalement atteint l’épilogue, qui commençait par une partie d’une courte prière de saint François d’Assise. « Nos mains s’imprègnent comme des racines », pouvait-on lire, « Alors je les place sur ce qu’il y a de beau dans ce monde. »

Par Thérèse DesCamp, Broadview, 18 mars 2024

Il ne s’agit pas ici d’une petite phrase sur la façon de réduire l’anxiété. Il ne s’agit pas d’un chemin simple pour transformer la tristesse en joie. Il ne s’agit pas d’une technique psychothérapeutique pour contrer le désespoir. Il ne s’agit pas d’un appel à l’action ni même d’une prière, comme on l’entend généralement.

Ce que vous trouverez ici est une pratique. Une pratique, par définition, est l’exercice d’une activité, répétée pour acquérir ou maintenir la maîtrise de cette activité. Une pratique spirituelle est ce que vous faites pendant environ 20 minutes par jour dans l’espoir que le sentiment de connexion et de capacité trouvé dans l’expérience vous accompagne pendant les 23 heures et 40 minutes restantes de la journée.

Il s’agit d’une pratique utilisant notre chagrin et notre chagrin comme chemin vers un cœur calme et une action aimante. C’est aussi une invitation à la joie.

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Alors que les incendies de forêt brûlaient à quelques kilomètres de là l’été dernier, que partout dans le monde les barrages se brisaient, que les guerres s’intensifiaient et que la rhétorique politique s’accentuait, j’ai eu du mal à retrouver un cœur tranquille. Ma pratique – lecture, écriture, méditation, prière – était difficile à maintenir. Pourtant, je savais que si je continuais à me présenter, la pratique me servirait de sentier à travers les bois sombres du désespoir, me conduisant à l’espace où je pourrais me souvenir que je suis enraciné en Christ. J’avais besoin de cette piste tous les jours, car ma sérénité était brisée chaque jour.

Depuis des mois, je parcourais le chef-d’œuvre de Merlin Sheldrake, Entangled Life, sur la science des champignons. Je lisais quelques paragraphes chaque matin et j’y réfléchissais à la lumière de ma foi. Tôt par une journée enfumée d’août, j’ai finalement atteint l’épilogue, qui commençait par une partie d’une courte prière de saint François d’Assise. « Nos mains s’imprègnent comme des racines », peut-on lire, « Alors je les place sur ce qu’il y a de beau dans ce monde. »

Mon cœur s’est accéléré. J’ai consulté la note de bas de page, j’ai fouillé mes bibliothèques, j’ai trouvé les Poèmes d’amour de Dieu de Daniel Ladinsky et j’ai lu les deux dernières lignes de sa belle interprétation de cette prière. « Et je les plie en prière, et ils puisent la lumière du ciel. »

Je me suis assis, avec le sentiment d’avoir reçu le manifeste contemplatif complet pour ce climat de catastrophe : un modèle pour travailler avec le deuil, un aperçu de la façon d’agir. Je commence donc cet essai avec gratitude. Merci, François d’Assise. Merci, Daniel Ladinsky. Merci, Merlin Sheldrake.

Et puis je me tourne vers la prière, vers la pratique.

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Nos mains s’en imprègnent comme des racines.

D’abord, je remarque les mots. Francis commence par le collectif : « Nos mains ». Comme « Notre Père », la première personne du pluriel dans cette courte prière nous rappelle notre expérience communautaire. François discute de la réalité humaine universelle selon laquelle nous avons été créés pour être en relation les uns avec les autres et avec le monde qui nous entoure. Plus qu’une relation, en réalité : nous sommes créés pour nous abreuver les uns les autres. Nous sommes destinés à nous tricoter les uns avec les autres.

C’est une belle chose, cette étreinte de notre moi incarné. Nous ne sommes pas les maîtres au-dessus et meilleurs que tout le reste ; nous ne sommes pas non plus des parasites qui méritent de mourir. Nous faisons simplement et magnifiquement partie du tout.

Je comprends cela : je suis un être bien-aimé et enchevêtré, faisant partie d’un réseau d’êtres bien-aimés et enchevêtrés.

« Nos mains s’imprègnent comme des racines. » Cette ligne enivrante évoque la façon dont les racines des arbres s’entrelacent en symbiose avec les champignons mycorhiziens, pour transporter les nutriments et les informations entre les arbres. Parfois, les racines et les champignons sont si étroitement liés qu’il est impossible de les distinguer, les champignons résidant en réalité dans le corps de la racine. De cette relation dépendent la santé des arbres et celle des champignons.

Puis je me rends compte que ce ne sont pas seulement les racines qui s’imprègnent. Lorsque j’expire, l’épicéa devant ma fenêtre inhale ce souffle. Lorsque cette épicéa expire de l’oxygène, je l’inspire. Ce remarquable cycle de respiration nous soutient tous les deux ; la santé de l’arbre et ma santé dépendent de cette relation. Ce remarquable cycle de respiration soutient toutes les créatures vivantes.

De la manière dont ma respiration s’intègre au monde, je passe à la réflexion sur le reste de mon corps. Je suis l’hôte d’une myriade de formes de vie, et ces formes de vie façonnent ma santé et ma vie. Je mange des plantes et des animaux ; de minuscules animaux décomposent mon corps quand je meurs, et les plantes utilisent cette matière décomposée comme nourriture. Nous sommes tissés ensemble dans la vie et dans la mort.

Nous sommes également intégrés mentalement au monde. En tant que systèmes neuronaux en boucle ouverte, chaque esprit apprend des esprits qui l’entourent. Mon esprit est restructuré en lisant votre livre ou en entendant votre discours. Mais j’apprends aussi de vous lorsque vous fredonnez une berceuse au bébé, lorsque vous postez un commentaire en colère, lorsque je passe devant un jardin que vous avez entretenu.

Il y a bien sûr un inconvénient à toute cette connectivité. Il est impossible de s’éloigner du monde physique et mental dans lequel nous sommes enlacés. Lorsque les arbres brûlent à flanc de montagne au-dessus de moi, je sens les flammes lécher mon écorce. Lorsque des tremblements de terre surviennent, je fouille les décombres à la recherche de mon tout-petit. Lorsque la sécheresse réduit le ruisseau à un filet d’eau, je reste haletant dans la boue. Lorsque les bombes tombent, je prie pour que mes adolescents rentrent sains et saufs à la maison.

Être entrelacé – m’imprégner comme des racines – signifie que je prendrai conscience des souffrances innocentes du monde. Être entrelacé signifie qu’il y a des moments où le chagrin me rattrape. Cela signifie que je ne peux pas – je ne le ferai pas – rester indemne alors que la Création gémit et se tord comme une femme en travail.

Comme le dit l’écrivaine et militante Rebecca Solnit, il est possible d’avoir « à la fois de l’espoir et un cœur brisé ». Ce qui m’amène à la beauté.

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Alors je les place sur ce qu’il y a de beau dans ce monde

Encore une fois, je regarde attentivement les mots. Il ne s’agit désormais plus d’une histoire sur l’expérience humaine collective. François dit : « Je les place ». Il suggère que l’individu puisse prendre des mesures spécifiques.

L’enseignante contemplative Cynthia Bourgeault raconte l’histoire d’un de ses amis, musicien de jazz et bouddhiste, qui gagnait sa vie en donnant des cours particuliers à des enfants : quatre heures par jour, six jours par semaine. Bourgeault lui a demandé un jour s’il s’ennuyait. Il disait parfois, mais seulement quand « je ne fais pas assez attention ».

L’attention est l’ingrédient qui éclaire le monde.

« Placer » quelque chose nécessite un mouvement prudent et intentionnel : l’attention. Poser mes mains sur le monde implique que j’entre en relation avec lui. C’est plus qu’un simple contact physique, c’est une prise de conscience. C’est de la révérence.

Je décide de consacrer mon attention à une promenade. Je pose mes mains sur les cèdres et reste jusqu’à ce que je puisse sentir la chaleur et la douceur de leur écorce. Je frotte les cicatrices faites par les griffes d’un ours sur un tronc de sorbier. Je sens la fraîcheur et le sable de la terre du jardin, je sens la poix d’un pin. Je pose mes yeux sur la lavande et l’or des marguerites de Saint-Michel. Je presse une rose musquée, frotte son aspect cireux sur ma paume, goûte son piquant. Je passe mes doigts dans la douce fourrure du chien.

Je mets la main sur la beauté. Lorsque je fais attention à la beauté, cela atténue la bande d’anxiété et de chagrin autour de ma poitrine.

Mais ensuite je commence à réfléchir. Qu’en est-il des choses que je ne trouve pas instinctivement belles ? François d’Assise a fait l’expérience de la conversion lorsqu’il a embrassé un lépreux, en écrivant : « Ce qui m’avait auparavant nauséeux est devenu pour moi une source de consolation spirituelle et physique. » Quand François dit : « Je les place sur ce qu’il y a de beau dans ce monde », je doute fortement qu’il veuille que nous touchions seulement aux jolies choses. Je soupçonne qu’il suggère que nous apprenions à voir la beauté en toutes choses.

Source:https://broadview.org/spirituality-climate-grie

Traduit et partagé par les Nouvelles Chroniques d'Arcturius

 


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