Aboutissement de près de 10 ans de collaboration, le satellite franco-chinois SVOM a décollé samedi 22 juin 2024 de la base de lancement de Xichang, au sud de la Chine. Son objectif ? Détecter et mieux comprendre les sursauts gamma, des flashs de rayonnement gamma issus du cosmos qui sont une manifestation de la fusion ou de l’explosion d’astres très massifs.

Dans les années 1960, des satellites espions américains sondent secrètement l’espace à la recherche de rayonnement gamma. Ils ont pour mission de vérifier que l’URSS respecte un traité stipulant l’interdiction des essais nucléaires sur Terre et dans l’espace. En 1967, deux bouffées de rayonnement gamma est détectée. Après maintes recherches, on ne trouve aucune trace d’essai nucléaire…

L’origine de ce rayonnement reste un mystère jusqu’à ce que l’on comprenne qu’il provient d’astres lointains et très énergétiques situées dans les galaxies du cosmos.

Depuis le début de l’ère spatiale – il ne sont détectables que de l’espace –, plus de 10.000 « sursauts gamma » ont ainsi été enregistrés. Le satellite sino-français SVOM (Space-based multi-band astronomical Variable Objects Monitor) vise à détecter et analyser ces sursauts – il devrait en repérer une centaine par an.

Cette collaboration entre les agences spatiales chinoises (CNSA) et françaises (CNES) emporte à son bord quatre instruments, dont deux ont été conçus par la France (ECLAIRs et MXT).

Des instruments qui communiquent entre eux

De multiples contraintes entourent la détection de sursauts gamma, à commencer par leur localisation. SVOM bénéficiera ainsi de deux instruments différents détectant l’émission directe de rayons gamma : l’un donnera des indications quantitatives sur cette émission ; l’autre, l’instrument français ECLAIRs, permettra de localiser le sursaut grâce à un système dit de masque codé – une sorte de QR code traversé par le rayonnement qui permet, en fonction de l’orientation du schéma détecté, de retrouver d’où provient l’émission.

Intégration de la caméra du téléscope MXT de SVOM.

Intégration de la caméra du téléscope MXT de Svom. © CNES/DE PRADA Thierry, 2021

Les sursauts gamma sont suivis d’émissions dans des longueurs d’ondes inférieures qui donnent de nouvelles informations sur le phénomène et permettent d’affiner encore sa localisation.
Mais il faut pouvoir détecter cette émission rémanente le plus vite possible, car elle baisse à mesure que le temps passe. Ce sera notamment le rôle des deux autres instruments (le MXT et le chinois VT, un télescope sensible à la lumière visible). « Une originalité importante de la mission est l’interconnexion entre les instruments », indique François Gonzalez, chef de projet SVOM au CNES. Une fois l’émission détectée, ECLAIR communique la localisation du sursaut au MXT et à VT, qui vont chercher les émissions rémanentes et continuer à affiner la position du sursaut à leur tour.

Et l’observation ne s’arrête pas aux instruments dans l’espace. SVOM sera placé en orbite basse pour pouvoir envoyer des informations sur terre le plus rapidement possible. Lorsqu’un sursaut est détecté, en moins de trente minutes, des télescopes au sol seront alertés pour orienter leurs observations vers le sursaut et une équipe d’astrophysiciens d’astreinte sera prévenue et pourra commencer à analyser le phénomène.

« Les sursauts les plus intéressants sont toujours aux limites des capacités de détection de nos instruments, rapporte Clara Plasse, doctorante au CEA qui étudie la nature des sursauts gamma. Dans ce genre de situations, il y a besoin d’une expertise humaine afin de valider l’alerte et de la relayer pour multiplier les observations au sol le plus rapidement possible ».

Le témoin de l’explosion et de la fusion des astres

Une des prouesses de SVOM tient aussi dans ses capacités computationnelles : « On va pouvoir descendre dans nos laboratoires les informations de chacun des photons captés par les quatre instruments du satellite« , déclare Cyril Lachaud, enseignant-chercheur et responsable scientifique du masque codé.

Un niveau de détail précieux, notamment pour mieux catégoriser les sursauts gamma et avancer dans la compréhension des phénomènes qui les génèrent. Pour l’instant on distingue deux catégories de sursauts gamma : le sursaut court, caractéristique, selon le scénario le plus probable, de la fusion de deux astres très denses (étoiles à neutrons ou trous noirs) ; le sursaut long, probablement causé par l’explosion d’étoiles très massives (des centaines de fois celle du Soleil) à la fin de leur vie.

Et si les sursauts gamma sont le phénomène le plus remarquable détecté par SVOM, car ce sont les événements les plus lumineux jamais observés dans l’Univers depuis le Big Bang, il sera aussi en mesure de détecter des bouffées de rayonnement gamma moins intenses, que l’on ne nomme pas « sursaut », mais qui sont tout aussi précieuses pour mieux comprendre les astres de notre Univers.

Ainsi, nous devrions en apprendre plus sur les magnétoiles, ces étoiles à neutrons particulières dont les éruptions magnétiques sont une source de rayonnement gamma, ou encore sur les blazars, ces trous noirs supermassifs au centre de certaines galaxies qui peuvent émettre des jets de rayons gamma.

Il faut encore s’armer d’un peu de patience avant les premières observations. Une fois envoyé dans le ciel, SVOM connaîtra une phase de tests et calibrages durant plusieurs semaines. Les premières détections surviendront au moi d’août. Le coût d’une telle mission est estimé à 60 millions d’euros côté CNES (et certainement d’avantage côté chinois puisqu’ils prennent en charge le lancement et que le centre de contrôle de la mission ets situé à Pékin).

« Actuellement le satellite est en parfait état« , déclarait François Gonzalez il y a quelques jours. Les instruments ont été assemblés à Shanghai en avril 2022 sur la plateforme du satellite qui a subi plusieurs tests de vibrations, de résistance au vide et à la chaleur en 2023. La lancement réussi ce samedi 24 juin par la fusée Longue Marche 2, jusqu’à la mise en orbite de SVOM, à 625 km l’altitude, est une première étape. La science va pouvoir commencer.

Par Loïc Duthoit

Source:https://www.sciencesetavenir.fr/espace/astrophysique/svom-lancement-prevu-ce-samedi-d-un-satellite-franco-chinois-destine-a-etudier-les-plus-grandes-explosions-de-l-univers_179122


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Texte partagé par les Les Nouvelles Chroniques d'Arcturius - Au service de la Nouvelle Terre